Grégory Lemarchal est mort

TacTac : C’est affreux cette histoire…
Marie-Cécile : Oui, c’est triste.
TT : Et puis surtout pour toutes ces petites filles qui ont voté pour lui.
MC : Elles s’en remettront. Elles ont vu Le Roi Lion ; elles ont conscience de la mort.

TacTac : Allo Maman ? Grégory de la Star Ac’ est mort.
Maman : Non ?? C’est affreux ! Mais ça veut donc dire qu’il était vraiment malade !!
TacTac : …

A vous parler de Maggy

C’est parce que je la vois parfois dans la rue que je l’écris. Une blonde en débardeur avec un gilet sur les hanches. Au détour d’une vitrine, d’un scooter ou d’une gare, Maggy me suit.
Nous avions très mal commencé pourtant – ce qui est très bon signe chez moi vu que j’ai commencé par détester de très bons amis.

Nous étions invités à la même soirée ; elle se trouvait sur un balcon, moi en dessous. Une bouteille de bière est alors venue s’exploser sur le sol à dix centimètres de ma tête. J’ai cru que j’allais la tuer. On n’entendait plus la musique sous mes hurlements. Je criais encore plus fort que JoeyStarr dans sa Zoum-Zoum-Benz. Personne ne m’avait jamais vu comme ça.
C’est pourtant comme ça que j’ai rencontré Maggy.

Je l’ai revue pour la deuxième fois le jour de la rentrée en Prépa. Personne ne se connaissait alors et s’exprimait avec parcimonie. C’est ce moment que j’ai choisi pour aller lui parler devant tout le monde :
« C’est bien toi Maggy ?
– Heu oui… (Elle ne se souvenait visiblement pas de moi.)
– C’est bien toi qui étais complètement bourrée à l’anniversaire de Stéphane et qui m’a balancé une bouteille de bière à la gueule alors ?? »
Tout le monde se mit immédiatement à dévisager cette jeune fille violente et alcoolique. Maggy se mit à rougir et aurait voulu s’enterrer six feet under.
Sa réputation était faite ; j’étais très fier de ma vengeance.

Je n’ai jamais pu supporter mes camarades de Prépa malgré mon caractère plutôt sociable. Chaque dimanche soir était propice à une profonde dépression où s’entretuaient les formules de Bayes avec les têtes de cons de ma classe. C’est à cette époque que j’ai le plus haï mes dimanches. Seuls mes sentiments pour Anne me poussaient un tantinet à retourner en cours le lendemain matin.
Jusqu’à ce que je sympathise avec Maggy.

Maggy c’était la fille qui explosait de rire en plein cours et que tout le monde prenait pour une conne. Parce qu’elle ne pouvait tout de même pas expliquer raisonnablement au prof qu’il venait de faire la pose « Staying’ alive » en posant une main sur sa hanche et en montrant du doigt une formule au tableau. Non, « ça ne l’aurait pas fait » comme on ne le disait pas encore à l’époque.
C’est à partir du moment où j’ai raconté la blague de la biscotte beurrée et du chat beurré qu’on balance par la fenêtre que nous avons sympathisés. Nous avons alors découvert l’un comme l’autre que nous méprisions les gens de notre classe – le mépris est le pire sentiment que je puisse éprouver sachant que la haine ne m’atteint que très rarement. Nous avons alors découvert l’un comme l’autre que nous nous moquions tous les deux dans notre tête des gens qui la composaient, et cela pour les mêmes raisons. Constance et ses « fait trop ‘ièche ‘ », Julien et ses chemises « Country-Club », Raphaëlle et ses positions « fleur de lotus », tout était propice à moquerie. Et c’est pourquoi notre amitié reposerait jusqu’à la fin sur le cynisme.

Nous avons tous les deux choisi d’intégrer la même école de commerce à la fin de notre Prépa. C’est alors elle qui m’a hébergé le temps que je trouve un appartement, et c’est avec elle que j’ai assisté à la chute des deux tours jumelles. « Je peux pas y croire c’est comme dans un film c’est pas possible ! » C’est aussi avec elle que j’ai monté une liste du Bureau Des Elèves et que j’ai gagné les élections qui feraient de nous les stars de l’école. C’est également avec elle que j’ai dormi trois heures quarante-cinq en quatre jours et que j’ai pleuré en regardant Nolwenn chanter Piensa en mi avec Luz Casal bourrée. Mais c’est surtout avec elle que j’ai pleuré cinq heures au téléphone lorsque je lui ai avouée que j’aimais les garçons et que je me trouvais allongé de nuit sur une route de campagne. Ca marque ces choses-là. Parce que je l’aimais, Maggy.

Je parle d’elle au passé car Maggy et moi ne nous parlons plus. Nous prenons indirectement des nouvelles de l’autre par un ami commun et ça s’arrête là. Car l’amitié a ses frontières comme tout amour. Car l’amitié détruit un cœur comme toute relation. Car Maggy et moi nous nous aimions plus que de raison ; sans être un couple.
Et sans avoir la même conception de l’amitié.

J’ai longtemps hésité à écrire ces lignes car j’ai longtemps hésité à écrire son vrai prénom.
J’ai longtemps hésité à écrire ces lignes, même si c’est elle que j’ai voulu appeler en premier après l’avoir dit à ma famille.
Sans le faire.

Si ces mots lui parviennent, je pense qu’elle saura y lire quelque chose de bon. Parce que oui on peut rayer quelqu’un de sa vie mais il en reste toujours une trace. Et plus que les pincements au cœur quand je crois la revoir, restent en moi les ridules de nos fous rires. De beaux restes en somme, de beaux dégâts.

Aujourd’hui, seul reste d’elle mon pseudonyme. Car TacTac c’est elle.
Et c’est pour ça que je tenais à vous parler d’elle, à vous parler de Maggy.

Mon boss et l’informatique

” Faut arrêter de faire du papier-coller !!! “

” Qui a changé sur mon ordi le code de passe ???? “

” Vous me le faîtes pour quand alors le site en langage SMS ?? “

“Venez, on va faire un check-op. “

TacTac : Quelles sont ses compétences ?
Mon Boss : Elle est bilingue Français-Anglais, elle est très très douée sur Word…

” Comment on dit PDF en Anglais ? “

Boss : Regardez Véronique mon nouveau portable comme il est beau ! Il a un claquet !
Véronique : Un claquet ? C’est super ça !
Boss : Et je peux même envoyer des SMS avec !!
Véronique : Génial !!

Les cages dorées

Peut-être vous souvenez-vous que je partage la phobie des boutons avec mon grand-père maternel que je n’ai jamais connu. Ce n’est pas que la seule manie que nous ay(i)ons en commun. Nous détestions et détestons les bijoux pour hommes.

Je n’entends pas par là les bagues pour pouces et les pendentifs plaques militaires façon Lukas Delcourt car il n’y avait pas encore de H&M à Barcelone quand mon grand-père était en vie. Je parle plutôt des chaînes de baptême et des alliances en tout genre.
D’ailleurs, par le plus grand des hasards (Thierry ?), mon père déteste également les bijoux pour hommes et a très peu porté son alliance. Non pas pour aller draguer de la strip-teaseuse dans un club miteux comme ces hommes mariés dans les téléfilms US de M6, mais parce qu’il ne peut plus porter de bague à l’annulaire droit depuis qu’il s’est blessé en ouvrant des huîtres – rappelez-vous que les hôpitaux regorgent de blessures aux huîtres et de bouchons de champagne dans l’œil pendant les fêtes de fin d’année.
Mon papa pourrait porter son alliance à l’autre main ou à un autre doigt me direz-vous. « Oui mais ça se porte pas à un autre doigt et des bijoux à la main gauche ça fait pédé. » Mon papa c’est l’plus fort : il a toujours réponse à tout !

Sauf quand il se voit offrir une chaîne de baptême par sa tante germaine par alliance (ça existe ça ?). Et c’est difficile de refuser de la porter lorsque la personne qui vous demande de le faire est mourante. Voilà pourquoi mon père porte constamment autour du cou une chaîne qui fait bling-bling comme le collier de notre chat Réglisse. D’ailleurs je les confonds parfois au loin dans la maison familiale :
« Bling ! Bling !
– Réglisse ? Chiquitin’ ! Miou miou ! Poutipouti ! Viens ici mon beau !!
– Heu non, c’est Papa.
– Ah. »

Mon papa c’est l’plus fort et il pense d’abord à sa famille. C’est pour ça que je l’aime. Et aussi parce qu’il a acheté le dernier Arcade Fire et qu’il a proposé de me le graver. Et ma maman elle adore No Doubt mais ça c’est une autre histoire.

A moi ma grand-tante m’a donné de l’argent sur son lit de morte pour que je m’achète une belle montre. Mais je ne l’ai pas encore fait 9 ans après.
Je ne supporte pas les bijoux pour hommes, c’est plus fort que moi. J’ai alors l’impression d’être aliéné. Le contact froid sur ma peau. Une montre comme menotte, une chaîne comme strangulation, je deviens alors esclave dans une cage dorée. Mais je sais bien qu’un garçon me donnera un jour sa clef pour que je puisse m’en échapper.

3 façons de sortir en boîte de conserve

Lorsque nous sortions en boîte avec Stéphane et Mickaël, nous avions trois façons d’envisager la soirée.

3 CDs dans le lecteur de la Cherokee :
Blink 182 pour Stéphane, le Best of de Phil Collins pour Mickaël et Ray of Light pour Bibi (rien à voir avec la chanteuse de Tout doucement, d’ailleurs ça ne s’écrit pas de la même façon).

3 tenues dans le coffre :
Jeans et t-shirts moulants pour entrer au Queen ; chemises, vestes et chaussures de ville pour les Planches et le Duplex ; et tenue normale pour le Metropolis et la Loco.

3 tactiques pour ne pas se faire refouler à l’entrée des boîtes :
Pour entrer aux Planches il fallait former des groupes de 2 filles + 1 garçon. J’étais donc chargé d’aborder la gente féminine esseulée à l’entrée de la boîte. Je devais leur demander s’il était possible d’entrer avec elles comme si nous les connaissions. Curieusement, elles acceptaient presque toujours ma proposition décente ne se sentant probablement pas agressées par le garçon que j’étais.
Devant le Queen, c’est également moi qu’on chargeait de la tâche la plus délicate. En effet, je paraissais plus frêle et sensible que mes deux compagnons. Idem devant le Duplex où je devais inspirer confiance au physio avec ma Breitling au poignet et mon profil que certaines personnes mal informées confondent avec celui d’un Feuj’ – la ressemblance est ailleurs. Le videur du Duplex s’inclinait alors devant TacTacStein et ses amis. La vérité si je mens !
Quant à la Loco et au Métro, aucune stratégie. Comment trois jeunes Versaillais comme nous pouvaient-ils se faire refouler d’une boîte où l’on passait du Mylène Farmer et du Patricia Kaas ?

3 façons de parler aux filles :
Stéphane tout en compliments improbables dont raffolent les gonzesses. Ca ne parlait jamais bien longtemps avec lui.
Mickaël avait quelqu’un qui l’attendait à la maison. C’est donc du regard qu’il communiquait avec les femelles. On touche avec les yeux !
Quant à moi, je parlais trop. « D’où tu viens ? Tu fais quoi ? Ce sont tes amis ? Tu veux un boire quelque chose ? Non non ça ne me dérange pas de payer 70 balles une vodka-orange avec que de l’orange… Et donc tu es une des organisatrices de la soirée ? Tu fais de la danse classique ? Ca doit t’aider à être souple… Le DJ c’est ton copain ??? »

3 façons de danser :
Mickaël comme un vrai garçon dans le sketch de Florence Foresti. C’est-à-dire pas du tout en rythme avec toujours les deux ou trois mêmes mouvements.
Stéphane préférait ouvrir sa chemise et montrer fièrement sa chaîne en or en transpirant bien fort.
Pendant ce temps-là, je me tenais un peu à l’écart de ce spectacle tellement j’avais honte d’eux.

Mais une fois éjectés de la boîte, la bière à la main devant le soleil levant versaillais, je pouvais à nouveau me montrer fier d’eux. Fier de partager avec eux une seule et même vision de l’amitié.

Spice World

Mon frère a cuisiné un jour en 1994. Il nous avait dit : « Je vais faire un poulet à la Louisiane ». Aucune idée de que ça pouvait être, mais Maman avait acheté ce qu’il y avait écrit sur la liste du frigo. « Et n’oublie pas le piment ! ».
Car pour être pimenté, c’était pimenté !
Seul mon frère parvenait à distinguer une once de goût dans ce qui était censé être du poulet. Mes parents et moi-même avions la langue qui avait triplé de volume. Nous déposâmes les armes des papilles à la première bouchée. Mon frère avait gagné : il ne cuisinerait plus jamais à la maison.

Les seules fois où mon frère est entré à nouveau dans la cuisine familiale furent pour préparer la sauce de la salade. Une sauce trop moutardée à mon goût. Mais à la limite, à choisir, je préférais la sauce de mon frère à celle trop vinaigrée de mon père et à celle trop huileuse de ma mère qui ne réussit pas à renier ses origines espagnoles jusque dans son coup de poignet.

En dehors de la sauce trop moutardée de mon frère, ma langue peut également s’enflammer pour l’huile des pizzas et le wasabi – parce que ça impressionne les petits pédés chez le Japonais. Mais en dehors de ces trois aliments, le moindre goût relevé déclenche en moi de curieuses réactions.

Demandez donc à Coloca ce qui m’arriva au KFC de Bangkok – le seul KFC au monde où il n’y a pas un seul Black. Je commandais un sandwich au poulet frit en pensant qu’il était identique à celui des Halles – autrement dit dégueulasse. Que nini ! Zobi la mouche ! Mon front se mit à perler, mes yeux à pleurer et mes cernes commencèrent à se recouvrir de petits points blancs. La tablée de petits Thaïs était hilare en voyant le Blanc ne pas supporter un sandwich ; eux qui croquaient à pleine dents des piments dragons dés leurs 3 ans.
Ce jour-là, je finis mon repas par une glace à la vanille.

Mais ça, ce n’est que le premier effet piment, car il y en a un second que tous les backpackers connaissent bien.

« Heureux qui comme Ulysse. » Ouais, si on veut. Car Ulysse c’est quand même le premier grand voyageur que la terre ait connu. Mais l’Odyssée ne dit pas s’il était encore heureux lorsque ses intestins criaient misère. A côté, le chant des Sirènes c’est de la gnognote c’est moi qui vous l’dit. Et encore, il n’est pas allé jusqu’en Thaïlande lui. Car il n’arriverait à personne d’autre ce qui m’est arrivé sur la plage de Koh Samui ce soir-là.

Nous profitions d’un repas de rois sur une plage au clair de lune avec Colica et sa soeuretta. Cocktails et autres breuvages dionysiaques, seafood et autres traquenards gustatifs, lorsque je sentis un Alien dans mon ventre. Mon visage se mit alors à suinter et mes intestins à se tordre dans tous les sens. Turista, turista, elle danse tous les soirs pour les touristes du coin quoi ne pensent qu’à boire. Oh Turista !
Et toiletta.

Oh my Buddha ! Mais où donc se trouvaient les lieux d’aisance dans ce restaurant ? A croire que dans ce genre de paillote, personne ne ressentait le besoin de se rendre aux commodités. D’un autre côté, dans Sous le soleil ils ne vont jamais aux te-chios…

Les toilettes se trouvaient de l’autre côté de la piscine. Pour s’y rendre, il fallait affronter une meute de chiens affamés. Ou plutôt trois pauvres sacs à puces qui ressemblaient à rien, mais je suis un peu Marseillais dans mes exagérations veuillez m’excuser.
Revenons à nos bichons : face à moi siégeait une horde de guerriers canins assoiffés de sang, ou de Thaï-Canigou en tube, au choix. Votre humble serviteur décida alors de traverser courageusement cette épreuve porté par les ailes de l’espoir, ou de la chiasse – « une bonne chiasse c’est une purge à pas cher ».
Mais en passant à côté de l’un des chiens, je sentis une pression sur mon jean. Non, pas derrière, je sais me retenir quand même, mais sur le mollet plutôt. Un de ces foutus clébards était en train de me bouffer la jambe !
Et c’est qu’il ne lâchait pas prise le bougre : « Tu vas me lâcher oui saloperie ?? ». Il me tenait la jambe alors que j’étais sur le point de me vider de toutes les entrailles. Et comme Matt Dillon dans Mary à tout prix, je me débattais avec un clebs pouilleux qui n’en démordait pas. Definitely Susan Mayer attitude.

La suite importe peu puisque je réussis à rejoindre mon trône. Et comme dans la blague de Toto aux toilettes, vous n’en saurez pas plus car la porte était fermée à clef.

Les hommes de la ligne 3

Je veux un homme de la ligne 3.

Un de ceux qui me regardent écrire dans le métro à 8h du matin. A 9h plutôt, car ces hommes commencent à travailler vers 9h30. Ils descendent à Opéra, Bourse ou Havre-Caumartin la lassitude au corps mais le pas confiant. Ils portent des manteaux longs, noirs le plus souvent, en pure laine vierge s’ils rentrent chez eux après 21h. Ils ont U2 et Police dans les oreilles et ne craignent pas de regarder Bonjour America sur leur iPod Video. Ils dévisagent l’intrus qui n’a pas mis son portable sur vibreur alors qu’ils faisaient de même en 1998, mais ça n’avait pas le même effet à l’époque. Ils portent une chemise et une cravate choisies par leur femme et embrassent leurs enfants déjà couchés en rentrant chez eux. Leurs enfants ne commencent à les connaître réellement que lorsqu’ils quittent la maison. Ils découvrent alors pendant de rares week-ends que leur père est plus détendu et sensible qu’ils ne le pensaient. Ils se mettent à voir ses véritables défauts, et ses failles surtout. Ils commencent alors à vraiment l’aimer. Ils commencent alors à aimer leur père non plus par évidence mais par choix.

Je veux un homme comme mon père.