Elle a senti que je voulais m’asseoir. Comme une évidence. La galanterie inversée m’est insupportable mais là je n’avais pas le choix : je devais m’asseoir.
Qu’a-t-il bien pu pousser cette Japonaise sophistiquée à me céder sa place dans le métro ? D’habitude c’est moi le galant, d’habitude c’est moi le cédant. Et elle a même poussé le vice jusqu’à me poker. Les écouteurs et le stylo à la main, j’étais bien trop occupé à décrire une infusion d’eucalyptus pour l’entendre me héler : « Il y a une place de libre ! ». C’est le stylo dans ma main, c’est le papier en sous-main qui l’ont poussée à me réserver la place. Elle a du s’inquiéter du sort de cet homme qui écrivait penché dans le métro. Sans une barre à laquelle s’agripper, le stylo devenait une arme à chaque virage.
La Japonaise aime son Prochain et ce n’est pas l’amour de l’Art qui l’a poussée à me faire asseoir : c’est l’amour de son œil et de ceux de ses voisins.