Etes-vous prêt ?
Le désir de réinvention concerne pratiquement tout le monde. De la petite chenille à Cindy Sander, de la rock-star bowienne à la plus madonnesque, à ta mère s’essayant à une nouvelle coupe de cheveux. Tout le monde veut changer, du moins évoluer. Cela probablement afin de justifier le temps qui passe, de regarder un jour une photo de soi sans trop s’y reconnaître et de pouvoir dire : « C’était moi. »
Pourtant la réinvention reste pour la plupart un fantasme. Comme le chante Céline – la Canadienne, pas l’antisémite – : « On ne change pas. » On reste à vie cette « petite fille ». Ou – pour un peu moins de la population mondiale – un petit garçon. (Afin de nous faciliter la tâche, nous exclurons dans ce billet l’analyse du cas de Josiane de Secret Story 4.)
Pour autant, n’allez pas penser que je sois pessimiste. Nous avons tous en effet la possibilité d’évoluer, de placer de nouvelles briques sur notre chemin ou de dynamiter des rochers ; seulement, dés notre plus jeune âge la plupart des pierres sont déjà posées. Prenons pas exemple mon cas – comme c’est étrange, vous ne vous attendiez pas à cela : dés mon plus jeune âge j’ai cherché à me réinventer. Un jour boxer, le lendemain cuisinier, un après-midi prince arabe, le lendemain Tortue Ninja des gentils quartiers : j’ai passé mon enfance à me déguiser. Comme tous les enfants du monde entier ? Continuons. A l’adolescence j’ai cherché à perdre du poids (12 kilos en 9 mois), ai insisté pour porter des lentilles, ai abandonné la raie sur le côté – que j’ai depuis ironiquement réadoptée -, ai fustigé les habits choisis par Maman… Comme tous les ados à cet âge ? Hum, continuons également.
Magali m’a fait remarquer l’année dernière qu’a priori mes trois principaux postes de dépenses sont :
- les sorties,
- les voyages,
- les déguisements.
Une trentaine de paires de lunettes, une dizaine de montres, des nœuds papillon à la volée, des masques et des accessoires à n’en plus finir, une visière chinoise, un kilt polémique, un pantalon de gaucho argentin, une cravate à paillettes, la combinaison de Kick-Ass, de quoi se teindre les cheveux en bleu, se tatouer la nuque et bien plus encore pour faire de moi l’élégant ou le vulgaire, le sublime ou le sommaire, selon mon humeur mais selon surtout trois principes :
- le ridicule ne tue pas,
- nous sommes là pour nous amuser,
- et là également pour nous façonner des souvenirs.
C’est pour cela qu’inconsciemment je m’entoure d’amis qui partagent ces mêmes valeurs. Regardez Clotilde rembourrée de coussins le pinceau à la main : n’est-elle pas une hilarante Valérie Damidot ? Et Florian en voilette, une Lady Gaga parfaite ? Et Arnaud en gladiateur ? Et Coralie en Dorothée sans Toto ? Et Romain en canard ? Et Thibaut en Katerine ? Et Alex et Matoo en Catwoman/Batman ? Je pourrais noircir des cahiers en énumérant les déguiguis de mes amis tellement j’ai participé à des soirées costumées dans ma vie. Stations de métro, Lettre V, Party de Campagne, Jungle Party, Imaginarium, Oscars, Peignoirs et Champagne, Mini-shorts et Champagne… Et bien entendu Le Style Avant Tout pour mes 30 ans, où les participants devaient venir dans leur plus belle tenue, celle dans laquelle ils se sentaient les plus à l’aise, celle dans laquelle ils se sentaient les plus beaux. Car qu’importent nos déguisements, ils ne sont pas là pour nous embellir : beaux les gens qu’on aime le sont déjà.
Pour cela qu’importe finalement ma tenue ou si je porte parfois des couleurs flashy pour me motiver, car ce n’est finalement que par mes actions que je peux me réinventer. « C’est lorsque tu as un coup dur que tu es le meilleur » me disait Florian l’autre jour et il avait bien raison. En deux semaines, j’ai booké plusieurs trains et hôtels, fixé une date pour l’opération de mes yeux, programmé mes vacances au Pérou (« Tû tû tû tû !!!« ), écrit, écrit, sorti, sorti, vu presque tous mes amis les plus proches, listé les coordonnées des éditeurs à contacter, entassé les vêtements d’hiver à donner, trié mes livres, chassé des bibelots, acheté un paillasson stylé… Énumérer, énumérer, là aussi je pourrai noircir des pages non pour me vanter mais pour construire, me construire, car il est bien question de cela. Les bâtons dans les roues ou – comme dirait Afida – « les arbres dans les bâtons » ne me font plus chuter. Je me sens de plus en plus fort, je ne ressens plus le besoin de me réinventer, ma personnalité est faite, elle est dessinée. Ca y est, je peux l’écrire enfin : je suis prêt.