À l’époque où j’écrivais sur feu Coquecigrue.net, je rédigeais chaque 31 décembre un billet sur les chansons de l’année. Ce n’était pas forcément un classement qualitatif, mais plutôt l’établissement d’une liste avec pour chaque mois le titre que j’avais le plus écouté ou auquel était rattaché un souvenir particulièrement marquant. Si j’ai cessé de publier ce classement pendant quelques années, je n’ai jamais cessé d’ajouter à la fin de chaque mois un nouveau morceau à ma playlist iTunes annuelle. Ainsi pour avril 2010, on retrouve « Paradise Circus » de Massive Attack, douceur amère associée au décès libérateur pour ma grand-mère. En 2011, c’est « Shake it out » de Florence and the Machine qui clôturait l’année avec un week-end à Londres qui se révéla être « darkest before the dawn ». En février 2012, ce fut « Silence » des Ting Tings pour ce mois durant lequel je n’avais pas besoin de musique tant ce que je vivais me suffisait. Oui, je n’ai jamais cessé de penser que la musique rythmait mes journées. Alors, sur quelles chansons mon année 2013 a-t-elle dansé ?
Janvier : « Skyfall », Adele.
Parce que les flocons de neige tombant du ciel n’ont jamais été aussi étincelants qu’avec Adele dans les oreilles. Et que j’avais besoin de me concentrer sur quelque chose de beau autour de moi alors que tout était laid, à l’intérieur, dans mon corps, au fond de moi.
Février : « Golden Baby », Cœur de Pirate.
Parce que j’avais moi aussi envie de chanter « Golden Baby, c’est est assez » au beau blond qui m’avait tellement détruit mais tellement reconstruit. Mais heureusement qu’il ne suffit pas d’écouter une chanson en boucle pour le vouloir et le pouvoir. Parce que grâce à mon Golden Baby j’avais connu un incroyable 14 février l’année précédente et que grâce à lui j’en provoquais un nouveau le 14 février 2013.
Mars : « Cyclo », Zazie.
Parce que mon boulot me rendait dingue et que mes illusions professionnelles s’effondraient en travaillant pour un escroc. Parce que traverser tous les jours Paris pour absolument n’avoir rien à faire de mes journées me rendait cyclothymique.
Avril : « Try », P!nk.
Parce qu’il fallait remonter en selle, faire avec ce que j’avais et continuer à essayer. Parce que si je ne faisais rien au travail alors j’allais en profiter pour faire plein d’autres choses, partir au Canada, recoller les pots cassés avec lui, avec elle, travailler sur un nouveau roman qui ne serait pas cette fois rejeté, et toujours continuer à avancer. Car c’est également le 23 avril 2013 que mon pays a avancé en me permettant un jour de me marier.
Mai : « Motherboard », Daft Punk.
Parce que bordel ce classement 2013 sans les Daft Punk ça n’aurait pas été possible ! Et même si ce n’est pas ce titre qui a rythmé mon incroyable anniversaire fête foraine pour lequel j’ai déployé une incroyable énergie durant tout le mois (et pour lequel j’ai rempli une piscine de 1300 balles dans mon appartement !), c’est bien le titre des Daft Punk que j’ai le plus écouté cette année (et qui m’a bercé de nombreuses fois dans le métro…).
Juin : « Comment t’appelles-tu ce matin ? », Élodie Frégé.
Parce que ça sentait la fin des relations d’une heure, au mieux d’une nuit, seul ou à plusieurs, dans la solitude et l’ennui. Parce que le titre était léger et ensoleillé dans cet été qui ne commençait pas. Parce que c’est Elodie et que je suis fidèle à vie. Et surtout parce que c’est le 13 juin qu’un ami est tombé dans le coma devant moi, que cet épisode a réveillé le pire épisode de mes précédentes vies, et que je me demandais surtout si cet ami allait se réveiller en se souvenant des prénoms des siens… Mais dans la vie rien ne se répète, rien ne se répète, et cet ami est toujours parmi nous et se souvient de mon prénom.
Juillet : « Les espaces et les sentiments », Vanessa Paradis.
Parce que je ne travaillais plus, que mon ami était sauvé, que je pouvais m’occuper de moi, que l’été était enfin là, et que je voyageais moi aussi dans les espaces et les sentiments. Au son des violons, le soleil couchant. Aux percussions, l’immensité des océans. Voyager, « c’est retrouver toute son enfance ».
Août : « Drew », Goldfrapp.
Parce que je continuais à voyager – seul cette fois – et que j’avais besoin de voix douces en journée pour m’encourager à de longues heures marcher. Parce qu’Auschwitz c’est l’horreur mais c’est aussi la beauté : la beauté de la Grandeur qu’elle soit Tristesse, Horreur ou Eternité. Parce que c’est tout d’un coup, dans les rues de Varsovie, l’image dans le ciel de deux avions qui se sont croisés et que queĺqu’un pensait donc à moi : et qu’à cet instant-même, il pense encore à moi. Parce que c’est seul dans ce pays – dans lequel personne n’a compris pourquoi je m’y rendais, que je me suis mis à tout comprendre. Parce qu’il faut sortir de chez soi et de soi pour reprendre.
Septembre : « Wings », Birdy.
Parce que c’était un nouveau job, de nouvelles ailes. Parce qu’une nouvelle fois ce n’était pas fait pour moi, mais que déjà plus rapidement je m’en apercevais. Je prenais donc ce qui était à prendre (l’argent) et me suis mis à écrire comme un fou à côté. Parce que je comprenais plus vite, même si j’étais plus rapidement fatigué qu’avant. Parce que je n’ai pas dit mon dernier mot, parce que si dans la vie tout est à perdre tout est également à gagner ; et que ça, je ne l’aurais pas volé.
Octobre : « Work B**ch », Britney Spears.
Parce que c’est en résumé ce que j’ai fait : bosser, bosser, bosser, et peu le temps de faire autre chose tant la fatigue creusait. Parce que cette chanson n’est pas particulièrement bonne : un hymne taillé pour les cours de sport et l’abrutissement. Comme un peu cette période peu enrichissante de ma vie qui a eu au moins le mérite de confirmer mon refus de la médiocrité. Et parce qu’il fallait sûrement me rappeler ce qu’était que la médiocrité pour à l’avenir du premier coup d’œil la rejeter.
Novembre : « Unconditionnaly », Katy Perry.
Parce qu’au début je détestais cette chanson, parce qu’elle gueulait trop, que c’était une chanson pop d’amour (donc de la soupe), et – mon Dieu – parce que c’était Katy Perry ! Puis, heureusement, je me suis aperçu que je m’étais trompé ; comme on peut se tromper sur tout mais rapidement le remarquer. Et finalement, c’est bien la chanson que j’ai le plus écoutée cette l’année. Parce que malgré les tourments que cela provoque, je reste fier et heureux de vouloir continuer à aimer, d’inconditionnellement aimer.
Décembre : « Libérée, délivrée », Anaïs Delva.
Parce qu’il m’a toujours été difficile de me décider sur la chanson qui allait clore l’année, car c’est bien sur celle de décembre que j’ai le moins de recul. J’ai hésité avec une autre à des kilomètres de l’univers féerique du conte de Disney : « Reflektor » d’Arcade Fire. Mais ce sont les paroles optimistes de « La Reine des Neiges » qui m’ont décidé. Comme une note pleine d’espoir pour la nouvelle année qui arrive, cette année pleine de défis : de nouveaux projets professionnels, de voyages au bout du monde, d’un nouveau roman à écrire au scénario presque-presque achevé… Je ne reviendrai plus sur 2013, « le passé est passé ». 2014, je t’accueille à bras ouverts : « Me voilà oui, je suis là. »