« Et je vous ai déjà raconté la fois où je suis tombé du lit et où j’ai failli casser la table de chevet ?
– Non !
– Et la fois où le mec avait une photo de Barbra Streisand au-dessus du lit ?
– Non plus !
– Et la fois où le mec m’a pété dessus pendant que je le doigtais ??
– Beeeeeeeurrrrrrk ! Raconte vite !!
– Bah non. C’est personnel. Ca ne se raconte pas. »
Archives mensuelles : janvier 2008
Oh, ma Lolita
Avec moi Lolita cet été-là.
« Lolita, lumière de ma vie » dans les bus de Portsmouth. Le long du trajet, « le feu de mes reins », jusqu’au centre de langues, les amis sur le chemin.
Tatiana, « Mon péché, mon âme. ». En amour j’allais tomber l’hiver suivant, son visage d’indienne, inévitable.
Lo-li-ta.
J’aurais mon lot de Lolita cet été-là : Anaïs.
Mes premiers bras serrés, mon jeune baiser de vie. « Le bout de la langue fait trois petits bonds le long du palais». Quelques instants de confiance et surtout l’impression; d’entrer dans un cercle. Intact.
« Pour venir, à trois, cogner contre les dents », un peu tardivement, mais tout de même là.
Lo. Li. Ta.
J’appris du cœur sa prose, humble Humbert. Et plus tard dans Ada, avec moins d’ardeur. Avec moins de candeur et d’admiration, que pour Lolita qui eut ma raison, ma raison sensuelle cet été-là.
Parler comme un veau espagnol
Lorsque Jérôme et Mickaël sonnèrent à ma porte parce qu’ils me cherchaient, ils obtinrent cette réponse de ma mère : « Il est à un barbe-cul ».
Ma mère étant espagnole, la prononciation de ce mot correspondait exactement à ce qui est écrit plus haut.
Jérôme et Mickaël en rigolent encore comme des cétacés.
« Il s’amuse beaucoup avec son petit copain.
– Maman !
– Quoi ?
– On ne dit pas « petit copain » mais copain. Je te l’ai dit mille fois !
– C’est vrai Leonor, si tu parles comme ça les gens vont finir par croire que notre fils est pédé. »
C’est vrai quoi, pas de méprise.
« Ca m’est mal tombé », « à preu près », « une mauvaise altitude », mes maîtresses corrigeaient de bien curieuses fautes dans mes expressions écrites. Et si j’ai pu pratiquement toutes les corriger avec le temps, il m’en reste encore une avec laquelle je cultive un lien indéfectible.
« Tu aimes le beurre ?
– Si.
– Mais non, on dit « oui » !
– Ah.
– Je suis sûre que t’en veux pas…
– Mais oui !
– Fallait répondre « si » ! »
Cécile a passé trois ans de notre lycée à m’apprendre à différencier « oui » et « si ». Sans succès. En raison de ma langue maternelle, chez moi c’est « Oui Maman oui ». Pauvre France.
« Ca toujours été ma faute si les enfants faisaient une faute en Français ! »
Oui mais ça a toujours été grâce à toi si je suis bilingue et si j’ai cette voix si particulière en moi. C’est grâce à toi si je parle comme un veau espagnol, et je ne suis pas peu fier de cela.
Le monde contre un regard
« Vous allez rentrer dans la pièce, vous approcher du groupe et lui dire bonjour. Rien d’autre. Vous allez répéter cet exercice trois fois. »
Séminaire de créativité pour ce deuxième jour en Ecole de Commerce. Je ne pouvais pas me raccrocher à Maggy pour cet exercice-là, vu qu’elle était en train de jeter ses émotions sur la toile. Dans un autre groupe, dans une autre salle. Ca m’était bien égal d’être séparé pendant quelques heures de celle que je connaissais avant de débarquer à Lille ; j’aime bien connaître les gens, les observer, les découvrir, et partager avec eux une certaine impudeur jusqu’à ce moment où ils arrêtent d’être des inconnus pour moi. De manière générale ; il peut m’arriver de partager plus avec des inconnus qu’avec mes vrais amis. La pudeur est un sentiment que je ne partage pas avec tout le monde ; elle est beaucoup trop précieuse.
Yaniss s’était jeté.
La porte qui s’ouvre, un garçon qui rentre dans la pièce, qui nous regarde et qui nous dit : « Bonjour. ».
Un deuxième passage identique.
Puis un troisième, extrêmement troublant.
Le groupe était resté silencieux comme une entité face à son bonjour. Yaniss avait souri, arboré ses armes Ultrabrite, puis était resté silencieux, tentant de regarder le groupe dans les yeux. Quinze personnes en même temps dans les yeux. Impossible. Alors la gêne, puis la vulnérabilité.
C’est vulnérable que j’ai connu Yaniss. Et c’est pour ça que c’est un vrai pote. Parce qu’il vous donne l’impression de vouloir dévorer le monde avec son sourire parfait, alors qu’en fait il ne lui demande qu’un simple regard.
Les bloggeurs n’ont pas de talent
« J’en ai marre des blogs où les gens racontent leur vie.
– Tu connais Pénélope Jolicoeur ?
– Ah ouais j’adore !
– Bah elle raconte sa vie pourtant…
– Ouais mais elle c’est pas pareil.
– Pourquoi ?
– Bah d’abord parce que c’est une bd et ensuite parce que…
– Parce qu’elle a du talent ?
– Exactement ! »
Cette discussion s’est tenue au boulot avec une collègue qui ignore que j’ai un blog.
Pourquoi est-ce que je lis tel ou tel blog ? Pour le talent ? Rien à foutre du talent, il n’y a rien de plus subjectif. Je lis un blog pour combler un besoin. Nourriture, sommeil, sexe et blogs, le prochain Soderbergh bientôt sur vos écrans.
C’est à ce moment-là qu’on s’attend à ce que je cite les blogs que je lis et quels besoins ils comblent. Je n’ai malheureusement pas le talent d’un Ikare pour m’atteler à cette tache. Talent ? Aurais-je parlé de talent ? J’aurais plutôt du utiliser le mot « courage ». Car pour moi, un bon blog est avant tout le résultat d’un véritable travail.
Pénélope, Matoo, Pheel ou Gonzague, vous ne me ferez pas croire que ces gens sont fainéants. Même le timide Procellus, qui essaie de se donner l’image d’un garçon peu kravailleur, me laisse penser qu’il est un vrai bosseur au vu de ses nombreuses pontes.
Alors après vous me direz que ce n’est pas du travail puisque c’est un plaisir. Et je vous répondrais que je connais des analystes financiers qui prennent leur pied avec les chiffres et que d’abord c’est moi qu’ai raison.
Ces blogueurs bloguent comme d’autres regardent la télé ou tchattent sur MSN : ils rentabilisent juste leur temps libre. Un blog peut laisser quelque chose derrière soi ; il permet de croire à l’optimisation de la créativité.
Moi en tout cas je pense comme ça : j’essaie d’optimiser mon temps en bloguant.
J’agrippe le stylo dans le métro, et après une journée d’ordi tapote le soirs mes écrits sur Word.
Bloguer est mon second travail car je m’investis lorsque j’écris. Et qu’importe si je n’ai pas de talent car je n’en ai pas besoin pour vivre plus fort.
Alors, lorsque certains estiment que nous n’avons pas de talent chez Coquecigrue*, j’ai envie de répondre avec mon légendaire répondant « Who cares ? ».
Et paf dans ta gueule ! Mange tes dents.
L’honnêteté c’est comme un paysage
« Il t’arrive toujours un truc ! Non mais sérieux, qui d’autre a déjà vu Chuck Norris dans le métro ? »
Vu comme ça, mon amie Marie-Cécile n’a pas tort. Mais le truc c’est qu’elle a rarement tort : c’est assez incroyable !
Par exemple, c’est la seconde personne à m’avoir fait remarquer que je pouvais être extrêmement dur avec les gens que j’aimais, beaucoup plus intransigeant qu’avec ceux qui m’indifféraient. Peut-être que tous mes amis l’ont remarqué et que personne ne me l’a jamais avoué, mais elle en tout cas a osé.
J’apprécie toujours l’honnêteté car je suis assez lucide avec moi-même. Je peux tirer la tronche et ruminer dans mon coin, mais je tombe rarement de haut lorsqu’on m’adresse une critique. C’est d’ailleurs assez désarmant pour mon (n+2) dont j’approuve les réprimandes mais également les compliments : « Tu sais TacTac, le compliment que je viens de faire je ne le fais pas à tout le monde.
– D’accord. »
Le même phénomène se produit en où rares sont les compliments à me chambouler. Caramel, bonbons et chipolatas, les paroles paroles sentent le cramé pour moi. Lucidité ou manque de confiance en moi ? Probablement quelque chose entre les deux. Il faudra voir un jour avec mon amoureux.
Réflexions d’adulte
Quand ça ne va pas
Quand ça ne va pas, j’essaie de sortir de chez moi. Aujourd’hui ça ne va pas et aujourd’hui ça m’a pris cinq heures pour sortir de chez moi.
Quand ça ne va pas, je vais à la boulangerie d’en bas. J’hésite pendant quelques secondes entre un croissant et un pain aux raisins, et lorsque je le mords dans la rue ça va un tout petit peu mieux.
Quand ça ne va pas, je prends le métro pour aller loin. Je prends la 3 plutôt que la 11 car la 3 c’est plus chic et c’est plus éclairé. Je préfère les sièges bleus aux marrons, et j’y préfère le trajet même si la station « Arts et Métiers » y est moins belle. Si je commence à y écrire c’est que ça va déjà mieux.
Quand ça ne va pas, je n’aime pas passer de coups de fil et préfère me promener tout seul. Je regarde les oiseaux planer dans le froid parisien et les petits enfants dans leur cagoule. Les mini-cagoules ça m’éclaire et m’obscurcit à la fois. C’est quelque chose que je n’achèterai pas quand ça ira.
Quand ça ne va pas, je m’achète une babiole mais jamais un gros truc : car je sais que je finirai pas le détester. Bury the hatchet écouté deux fois, un patte d’eph’ porté une fois ; je n’ai pas très bon goût quand ça ne va pas. Alors j’achète pour la maison, car en achetant pour elle c’est un peu comme si j’achetais pour lui, pour l’appartement dans lequel il vivra. Car quand ça ne va pas, je n’achète pas vraiment pour moi.
Car tout simplement, si ça ne va pas, c’est que je ne pense pas assez à toi.
En retard
« Désolé Christophe, je n’ai pas entendu le réveil et ensuite j’ai été appelé en salle d’ITV.
– Pas de problème. Tu me feras deux tours de plus.
– Mais… »
Heureusement que ça ne se passe pas comme ça à mon taf, sinon je ne serais plus que la peau sur les fémurs. J’ai en effet la chance d’exercer un de ces métiers assez laxiste sur les horaires. En gros, je peux me pointer au taf sans pointer de 8h45 à 10h15. En revanche, je ne peux pas me barrer à 18h ; ce qui m’empêche de regarder la Star Ac’. J’ai demandé à mon patron de nous installer une télé dans l’open space, mais curieusement il a refusé.
Pourtant il était bien agréable de suivre les aventures de Grégory, Harlem et Hoda lorsque je travaillais pour la chaîne Comédie !. Qu’il était stimulant de rédiger des contrats en regardant Lucie se prendre des vents de Mathieu. En revanche dés que John entamait les claquettes, je retournais à ma paperasse aussi net.
Comédie ! ou l’art d’arriver en retard. J’arrivais alors au travail à l’heure que je voulais et sans vraiment d’excuse. Ma boss étant au 4ème et moi au 3ème, il m’arrivait souvent de faire croire que j’étais là depuis une heure mais que je discutais avec les nanas de la RH. Non sans avoir pris soin de porter mon manteau au bras.
« Tu es toujours en retard, mais je suis sûr que tu arrives toujours à l’heure pour un rendez-vous important. »
Faux. Je n’arrive pas alors à l’heure ou en avance, j’arrive atrocement en avance. J’arrive avec ¾ d’heure d’avance à un rendez-vous professionnel. Je suis incapable d’évaluer le temps qu’il me faut pour aller d’un point à un autre, même si ce trajet a maintes fois été rebattu.
Je n’ai pas d’horloge dans la tête, mais à la place une mécanique bien huilée pour me faire pardonner. Me faire pardonner de ne pas trop aimer les auréoles après avoir couru dans le métro.
La beauté au ralenti
Hier on m’a fait un des plus beaux compliments qui soient : on a loué ma vision du monde.
Je parlais d’une promenade et du constat de la laideur des villes. Que les grues et la tristesse des gens sans lendemain, sans ambition car sans condition, ne m’avaient pourtant pas donné le bourdon. Car la musique dans mes oreilles m’avait donné l’impression de voyager. Les paysages froids et industriels du Nord de l’Angleterre étaient devant moi, je m’étais transporté là où je ne pouvais naturellement aller, emmitouflé dans mon sombre manteau façon Robbie Williams dans le clip d’Angels.
Je racontais ça de façon moins péteuse lorsque ce garçon me confia ça, qu’il enviait ma vision poétique du monde. Ca peut paraître con mais ça m’a touché. Et ceux qui me connaissent bien savent que les compliments agissent sur moi comme du Téflon ; ils n’adhèrent pas.
Ma vision du monde, ça doit bien valoir quelque chose pour qu’une personne s’y attarde.
Lorsque je marchais tout à l’heure dans le couloir qui relie la 11 à la 1, je voyais les gens au ralenti. Et je pensais à Cashback et à American Beauty, à ces garçons qui voient la beauté de ce monde dans un supermarché ou dans un sac plastique.
Il y a tellement de beauté dans ce monde, et j’ai la chance de pouvoir la voir.