Ai-je couché avec assez d’hommes pour ne jamais avoir envie de le tromper ?
Lorsque je repense à mes quinze ans, je me revois dans mon lit. Esseulé, allongé sur un matelas au milieu du Pacifique. Je dérivais seul, sans l’ombre d’un compagnon.
En grandissant, mes compagnons ont également grandi. 34, 47 ans. Des âges insolents pour un garçon de 23 ans. Et mes conquêtes, toujours plus nombreuses. Un garçon, une fille, un baiser, un casé, un divorcé, un Américain, des inconnus, beaucoup trop d’inconnus. Des centaines dans leur lit. Toujours dans leur lit ; les exceptions sont rares puisqu’elles sont exceptions.
Et jamais personne là-dedans, jamais personne qui ne me retienne dans ses draps. Personne qui me donne envie de rester là.
Alors aujourd’hui je suis libre mais je suis deux. Aujourd’hui je suis libre et j’ai vécu. Des baisers violés par centaine, des regards biaisés par dizaine. Toujours dans les yeux, même si c’est un jeu. Quelle valeur apporter à ce qui m’attend dans Son lit ?
Je préférais un homme qui en aurait connu des dizaines, des milliers, pour que soudain il s’arrête. Sur moi. Chez moi.
Il a vécu, j’ai vécu ; il s’est lassé, j’n’ai pas l’air rassasié.
Aujourd’hui j’ai peur, peur de le tromper alors que je pourrais l’aimer et – nouveauté – lui aussi pourrait m’aimer.
L’amour me fait flipper.