Je ne suis rien sans mon café du matin. Tout comme Phyllis Van de Kamp, je suis extrêmement malléable avant d’avoir bu mon arabica. Vous pouvez me dire tout ce qui vous chante, j’approuverai. Vous pouvez me proposer un contrat pour acquérir une encyclopédie sur les fourmis du Nicaragua en 24 volumes, je signerai.
C’est pourquoi il ne faut jamais me transmettre d’informations capitales avant mon café du matin ; je ne les retiendrai pas. Et ça, j’ai beau le répéter, ma mère ne l’a toujours pas compris en 25 ans. Peut-être s’amuse-t-elle d’ailleurs au réveil à me raconter sa vie et à me dresser la liste des choses que je dois faire pendant la journée lorsque je vais lui rendre visite. Peut-être jubile-t-elle de constater en fin de journée que je n’ai rien fait de ce qu’elle m’avait demandé. Non par mauvaise volonté mais pas pure ignorance.
Voilà qui expliquerait pourquoi je mettais tant de temps à me réveiller étant enfant. Car ils peuvent me dire ce qu’ils veulent dans la pub, mais un bol de Chocapic ça réveille moins qu’une tasse de Carte Noire. La preuve en est le jour où je me suis rendu en classe en chaussons. Susan Mayer attitude.
Je me permettrais même de pousser le raisonnement encore plus loin, jusqu’à des contrées lointaines et des terres inexplorées. Comment faisaient-ils pour se réveiller avant 1492 et la découverte du café par Cricri Colomb et ses joyeux compères ? Le chant du coq leur suffisait-il ? Les odeurs nauséabondes de la ville suffisaient-elles à les extirper d’une profonde somnolence ?
Remarquez, ils avaient bien des avantages à l’époque au réveil : bien qu’ils ne connaissaient pas l’existence du noir nectar, ils ignoraient par la même occasion l’existence de Magloire et de William Leymergie. Et ça, c’est déjà pas mal.