On a freezé le pire

« Alors Mamie, ça vous a plu la Freeze Party ?
– Elle bouge pas.
– Bah faut arrêter de freezer Mamie. C’est fini maintenant !
– Elle bouge toujours pas Jean-Pierre ! »
Et c’est ainsi que Mamie finit ses jours en ce 8 mars 2008 : freezée comme un caniche.

« Pourquoi un caniche ?
– Je sais pas, je trouvais ça drôle. »

You only see what your eyes want to see. You’re frozen.
La FreezeParty a commence plus tôt que prévu à Paris-Troca. On a préféré y troquer un temps d’avance pour qu’au plus tôt la foule se disperse. Car du monde il y en avait, tant de gens c’était suspect ; même pour les touristes japonais.
Je cherchais Ikare du regard et l’effroi me glaça. Je cherchais Matorif du kiff et la glace me fit “pfifff”. A Pompéi je serais mort à la recherche d’amis. On ne veut pas mourir seul.
A part Katoucha qui voulait mourir sur Seine.

La main comme un Indien sur mon front déplumé, j’entends les battements du Troca silencieux. Je regarde au loin et la pétrification se confond. Les milliers d’individus immobiles ne font plus qu’un, et le vieux que fixent mes yeux en est le cœur. Le cœur du silence. Un vieux qui dénote au milieu de tous ces Facebookiens, ces moi avec qui je partage la même CSP. Ces blousons en cuir, casques de scooter et barbes mal rasées. Ces clones gelés que longtemps je pourrais contempler. Au milieu du Louvre j’aurais préféré, figés parmi les statues samothraciennes. Nous serions redevenus ce que nous étions.

Expérience collective pour le voyeur ; expérience individuelle pour la statue. Fixation intime sur soi, sur ce qui n’a aucun sens, aucune revendication ; sur ce que le temps fait et sur ce que nous défaisons. Nous l’avons reconstruit le temps d’un monde gelé.

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