Virée lilloise

Vendredi dernier à la Tchouka une boite gay lilloise.

Je propose à mon pote Fred d’essayer un nouveau jeu. Comme c’est l’année des moches, nous nous devons de les honorer. Nous allons donc draguer du moche !

Fred met aussitôt la barre très haut en interceptant un moche vraiment exceptionnel, cheveux longs et catogan lalanesque de rigueur pour cet étalon ch’ti.
Il lui fait la bise comme s’il le connaissait depuis toujours.

Fred : 1 point.

Je m’attaque alors à un moche hideux pas beau de gueule mais hyper bien foutu de corps. Je lui fais du collé-serré franckyvincenesque contre son dos. Je lui palpe le cul. Il se retourne et me dit avec un grand sourire :
« Mais chéri t’es en train de me tâter le cul !
– Bah oui. »

Et c’est là que ma main s’aventure vers son bas-ventre et qu’il s’écrit :
« Ah non chéri ! Pas la bite ! Touche-moi le cul suis passif ! »
Je ne peux alors m’empêcher de le laisser se dandiner sur des tubes hungupesques et d’aller frénétiquement raconter l’anecdote à Fred.

C’est alors que le Moche revient à la rescousse pour me dire :
« Faut pas le prendre mal chéri ! »
Ce à quoi je réponds :
« Oh non ça va, t’inquiète pas, je vais m’en remettre très très vite. »

TacTac : 5 points.

Nous traversons la boite avec Fred. Nous passons à côté de deux mecs pas mal du tout. L’un dit à l’autre :

« Y’ a que des moches ce soir.
– Merci, ça fait plaisir. »
C’est moi qui ai sorti ça.
« Mais non toi t’es mignon comme tout ! »
Et hop que j’te fais la bise comme si j’te connaissais super bien. Et hop que moi je commence à le peloter. Et hop qu’il se barre. Et merde.
Il s’en va rouler des pelles à ses potes. C’est soirée bon enfant, tout le monde se roule des pelles. Il revient vers moi qui lui dis :
« Et moi j’ai le droit à rien du tout ? »
Et hop qu’il me roule une pelle.

TacTac : 10 point.

Il s’en va reparler à ses potes. J’essaie de m’incruster mais je fais tomber son whisky-coca. Boulet. Je lui en achète un autre alors qu’ils ont une bouteille avec ses potes. Je crois que le geste lui fait quand même plaisir. Il a intérêt : ça fait cher la pelle.
Il retourne parler avec ses potes et moi je me fais chier. Fred a disparu.

Je vois un trentenaire en costard sombre col roulé noir cheveux poivre et sel. Je ne savais pas que George Clooney était Lillois. Il ressemble à un de ces gars habitués des piano-bars. Je commence à le bouffer du regard. Je le sens gêné puis attiré. Je m’approche de lui et lui sors :

« On fait connaissance ? »
(Ouais ok sur ce coup-là mon “point d’ancrage positif” n’était pas terrible, mais on ne peut pas être pertinent à tous les coups.)
Lui : « J’ai envie de sexe.
– Ok, mais que du soft.
– Du soft ?
– Oui du soft.
– Hein ?
– Bah du soft quoi.
– Hein ?
– Bah pas de trucs hards…
– Hein ?
– PAS DE SODOMIE QUOI !!
– Ah ok. Bah non alors.
– Ok tant pis. Bonne soirée. »
Ou comment le romantisme est mis à rude épreuve.

Un bon moment se passe avant que je ne m’aperçoive que je commence à me faire chier tout seul contre mon mur avec ma Smirnoff Ice. Je me rends compte que je ressemble à ces minets désespérés qui chassent seuls en boîte afin de rentabiliser leur Coca Light à 7 euro. Heureusement que George Clooney revient à la rescousse :
« Finalement ça me tente bien. »
La première réaction que j’ai est la suivante « Putain il doit se faire tard et il ne reste plus que les moches sur la piste », puis je lui dis « Ok ».
Je vais chercher mon blouson au vestiaire : « T’habites loin ?
– Non pas trop… »
En effet il n’habite pas très loin : la porte juste à gauche de la boîte !
Il me demande d’attendre quelques instants sur le pallier et commence à gueuler « Céline ! Céline ! Céline ! ».
Un chien débarque devant moi.
« Ton chien s’appelle Céline ?
– Non, c’est Bonnie.
– Salut Bonnie ! »
Et voilà que je commence à faire des papouilles à un chien alors que je suis là pour faire du sexe. En fait j’aurais du me rendre dans un chenil ce soir.
Il me prend par la main et hop c’est parti sur son lit. (Le mec, pas le chien.)

« Va plus doucement. Descend plus. Oui c’est bon là. Vas-y fais comme ça. Non comme ça plutôt. »
Il commence à me gaver.
« Oh là oui c’est bon. Non, fais plus ça. Oui là c’est bien. Non pas là j’aime pas. Fais-toi plaisir. »
Oui bah je vais me faire plaisir tiens : « Bon j’en ai marre moi. Je me casse ! »
Lui : « M’en veux pas.
– Hein ?
– M’en veux pas s’il te plait ?
– Mais non je t’en veux pas enfin… C’est juste moi… Heu…
– Je me suis fait larguer aujourd’hui. »
George Clooney commence à m’attendrir. Je le prends dans mes bras. J’apprends qu’il s’appelle Yann. Je lui dis qu’il a une tête à s’appeler David. Je dois être vraiment super bourré. Je commence à lui faire des bisous sur la joue. Puis sur tout le visage. Il se détend. Moi aussi. Je redescends sur son corps. C’est beaucoup mieux qu’avant.
Le sexe quand on connaît le prénom de son partenaire c’est tout de même un petit mieux.
Tout se passe très bien jusqu’à ce que…

DRING ! DRING ! DRING ! DRINNNNNNNNNG !!!!!
Je n’ai jamais entendu quelqu’un s’exciter autant sur une sonnette !
« C’est Céline.
– Céline c’est ta femme ou quoi ??? » dis-je en me rhabillant à toute vitesse.
Il m’affirme qu’il est bien pédé. Il descend dire à Céline de repasser dans 5 minutes car il n’est pas tout seul. Juste avant de partir je serre très fort Yann dans mes bras qui s’excuse pour ce soir. Moi je le remercie pour ces moments exceptionnels.

TacTac : 20 points.

Je sors de l’appart’ et me retrouve devant la Tchouka. Un groupe de garçons complètement saouls parle de se retrouver chez l’un d’entre eux pour le petit-déjeuner. J’y reconnais le garçon qui m’a embrassé dans la boite. Je m’approche de lui et lui demande son numéro de téléphone. Il me le donne. Il a confiance en moi. Il m’informe que le petit-déjeuner se passe chez lui et que j’y suis invité. Je lui promets de venir mais je dois d’abord chercher mon pote Fred. Pas de problème je peux venir avec lui, mais ses potes le haranguent déjà et l’emportent loin de moi. Je lui fais un signe de la main comme sur un quai de gare. J’en profite pour retirer un poil de ma bouche.

Fred sort de la boite. Je ne sais pas comment il a occupé son temps libre. Je lui propose d’aller au petit-déjeuner. Il décline l’invitation. Tant pis, j’irai tout seul à l’autre bout de Lille.
Je commence à dessaouler en marchant mais je me persuade qu’il faut que j’aille chez ce mec. Qu’il en vaut peut-être la peine, que ce qu’il m’a dit dans la boite et que je garde pour moi m’a touché.

30 minutes après je sonne à sa porte. On a tous les deux moins bonne mine à la lumière de l’ascenseur mais ce n’est pas pire que sur la ligne 14. Je lance un « Salut les gens que je connais pas ! » à 3 pédés et à une vieille nana avachis dans un canap’. Je ne suis pas la seule pièce rapportée ce soir : y’a aussi un Black de Suède. Je ne savais pas que ça existait. Il essaie de nous faire croire en Anglais qu’il est hétéro mais moi j’y crois pas : avec un treillis, une casquette et un débardeur kaki c’est difficile à y croire. Magicien, y’a pas de magie dans ton chapeau.
La nana s’appelle Estelle. Elle est très sympa. Une bonne FAP ; comprenez par là « Fille A Pédés ». Maxou – un des potes du garçon qui me plait bien – me montre ses piercings aux oreilles. Il en a 3 et aucun au même endroit que sur l’autre oreille. Et bien entendu aucun dans le lobe car c’est trop consensuel.
Le garçon qui me plait ne me parle pas. Il consulte ses messages sur Gaypax et regarde son MSN. Je lui pique son ordi pour ajouter mon adresse à ses contacts MSN. Si c’est le seul moyen de communiquer avec lui ça en vaut peut-être la peine. Ce sera tout pour ce soir. Je m’en vais.

TacTac : 0 points.

Il me rattrape. Il insiste pour me raccompagner à la porte. Il me regarde dans les yeux. Il a les yeux bleus et je n’aime pas ça d’habitude. Mais j’aime ça chez lui. Je le prends dans mes bras. Il m’embrasse. J’ai du mal à partir. Il a du mal à me lâcher. C’est le meilleur moment de la soirée. Je m’acquitte de ses baisers et m’en vais dans un sourire. Je ne le reverrai probablement plus jamais mais qu’importe : il aura justifié à lui tout seul cette virée lilloise.

TacTac : 1000 points.

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