J’avais une heure devant moi. Mais, connaissant mon sens inné de l’orientation, il me faudrait au moins trois-quarts d’heure pour effectuer à pied le trajet d’Odéon à la Sorbonne. Je n’en étais pas loin, car je mis pratiquement une demi-heure à me rendre au lieu de rendez-vous, chaque passant rencontré ayant sa propre interprétation de l’expression « fontaine de la Sorbonne ». Et non : Google a également sa propre interprétation de cette expression.
Une fois arrivé sur place, je me posais enfin quelques minutes dans un café afin de commander un Coca Zéro hors de prix. Je ne me voyais pas commander de l’alcool, je devais pouvoir être sobre pour me souvenir pleinement de cette histoire dans ses moindres détails, pour pouvoir encore la raconter dans de nombreuses années. Je passais quelques appels aux amis qui continuaient à suivre mes péripéties par SMS. « C’est génial ! », « C’est dingue ! », « C’est une histoire de fous ! », revenaient souvent dans ma bouche et la leur. Une histoire totalement hallucinante dont le dénouement inexorablement approchait. Et même si je commençais sérieusement à être fatigué d’avoir couru toute la journée, je redoutais la fin de cette journée que j’aurais souhaitée jamais ne voir se terminer. Il était 20h30, je payais mon Coca Zéro, prenais une grande bouffée d’air et sortais du café. Je le voyais au loin, finissant de bavarder avec deux étudiantes qui ricanaient. Il sut que c’était moi. J’avançais vers lui.